Le recouvrement des pensions alimentaires

01/03/2021 - mise à jour : 21/03/2021

En cas de défaillance dans le règlement d’une contribution due pour l’entretien et l’éducation de l’enfant, d’une contribution aux charges du mariage, d’une prestation compensatoire fixée sous forme de rente ou de subsides, y compris leur indexation, le créancier peut en obtenir le paiement en utilisant l’une des procédures suivantes.

Les voies d’exécution de droit commun

Le créancier peut en obtenir le règlement des sommes qui lui sont dues par l’intermédiaire d’un huissier de justice et par voie d’exécution forcée. L’huissier pourra ainsi procéder à une saisie des rémunérations du débiteur, une saisie-attribution de son compte bancaire, une saisie mobilière voire une saisie immobilière.

Il convient pour cela de s’adresser à un huissier de justice.

La procédure de paiement direct des pensions alimentaires

►Les textes

articles L213-1 à L213-6 et R213-1 à R213-10 du code des procédures civiles d'exécution

Les conditions

La procédure de paiement direct des pensions alimentaires peut être sollicitée par tout créancier d'une pension alimentaire et dès qu'une échéance d'une pension alimentaire n'a pas été payée à son terme. Elle concerne la contribution à l'entretien et l'éducation des enfants, la contribution aux charges du mariage (article 214 du code civil), la prestation compensatoire sous forme de rente viagère (article 276 du code civil) (et non à la prestation compensatoire en capital payable par versements périodiques dans la limite de huit années), les subsides de l'article 342 du code civil (article L213-1 du code des procédures civiles d'exécution).

Elle est envisageable lorsque la créance a été fixée par une décision judiciaire devenue exécutoire, une convention homologuée par le juge, une convention de divorce ou séparation par consentement mutuel conventionnel, un acte reçu en la forme authentique par un notaire ou une convention fixant le montant d’une contribution à l’entretien et l’éducation des enfants rendue exécutoire par le directeur de la CAF ou la MSA (article L582-2 du code de la sécurité sociale.

Elle peut concerner les termes à échoir de la pension alimentaire, mais également les termes échus pour les six derniers mois avant la notification de la demande de paiement direct (qui seront réglés par fractions égales sur une période de douze mois). Si la procédure de paiement direct est sollicitée par la CAF ou la MSA pour le compte du créancier, elle peut concerner les termes échus de la pension alimentaire des vingt-quatre derniers mois avant la notification de la demande de paiement direct (qui seront réglés sur une période maximale de vingt-quatre mois)

Dans le cadre d’une procédure de fixation d’une pension alimentaire, le débiteur peut accepter que la pension donne lieu à paiement direct et il indique le tiers débiteur qui est chargé du paiement.  De même, la convention de divorce ou de séparation de corps par consentement mutuel conventionnel peut prévoir que la pension alimentaire donne lieu à paiement direct.

La mise en œuvre

• Le créancier doit obligatoirement s’adresser à un huissier de justice pour mettre en œuvre la procédure de paiement direct.

Par dérogation, une administration publique ou un organisme débiteur de prestations familiales subrogés dans les droits d'un créancier d'aliments peuvent former eux-mêmes la demande de paiement direct.

• Le créancier peut se faire payer directement le montant de la pension par les personnes qui sont elles-mêmes débitrices de sommes liquides et exigibles envers le débiteur de la pension. Le plus souvent, il s’agira de l’employeur du débiteur.

• Le paiement se fera  par préférence à tous autres créanciers, et les sommes seront attribuées au bénéficiaire au fur et à mesure qu'elles deviennent exigibles.
Le tiers est tenu de verser directement ces sommes au bénéficiaire selon les échéances fixées par le jugement.

La cessation du paiement direct

Le paiement direct cesse :

  • si l'huissier du créancier en notifie au tiers la mainlevée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception
  • ou à la demande du débiteur, sur production d'un certificat délivré par un huissier attestant qu'un nouveau jugement ou une nouvelle convention réglant les effets du divorce ou de la séparation de corps par consentement mutuel a supprimé la pension alimentaire ou constatant qu'en vertu des dispositions légales la pension a cessé d'être due.

La demande de paiement direct peut être contestée en justice sans préjudice de l'exercice d'une action aux fins de révision de la pension alimentaire.

Le créancier d'aliments qui, de mauvaise foi, fait usage de la procédure de paiement direct peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros.

Le recouvrement avec l'aide de la caisse d'allocations familiales

► Les textes et formulaires

Les conditions

Cette procédure ne concerne que le recouvrement de la contribution à l'entretien et l'éducation d'un enfant mineur, et non les autres créances alimentaires (un enfant majeur doit donner mandat à l'organisme débiteur de prestations familiales de recouvrer cette créance pour son compte).

En outre, le créancier doit remplir les conditions suivantes:

  • bénéficier d'une décision de justice exécutoire fixant le montant de la contribution
  • ne pas remplir les conditions d'attribution de l'allocation de soutien familial
  • avoir engagé une voie d'exécution infructueuse

La mise en oeuvre

Le créancier doit s'adresser à son organisme débiteur de prestations familiales (ODPF) en complétant le formulaire de demande d'intermédiation financière  ou d’aide au recouvrement des pensions alimentaires

Le directeur de l'ODPF établit un état des sommes à recouvrer, le recouvrement pouvant porter sur les termes à échoir de la contribution et sur les termes échus dans la limite de deux années à compter de la demande de recouvrement.

En outre, l'ODPF peut verser au créancier, à titre d'avance, une allocation différentielle qui complète le versement partiel effectué par le débiteur, jusqu'au montant de l'allocation de soutien familial. Il est alors subrogé dans les droits du créancier, dans la limite du montant de l'allocation de soutien familial ou de la créance d'aliments si celle-ci lui est inférieure, ce qui signifie que seul l'ODPF peut recouvrer ces montants sur le débiteur,  à la place du créancier.

Avec l'accord du créancier, l'ODPF peut également recouvrer sur le débiteur les montants dus au titre de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant qui sont supérieurs au montant de l'allocation de soutien familial.

La fin de la procédure

L’intermédiation financière des pensions alimentaires (IFPA)

Les textes et liens utiles

L’intermédiation financière des pensions alimentaires, qui n'était envisageable qu'en cas de violences conjugales ou de violences à l’encontre d’un enfant commun, et, depuis le 1er octobre 2020 pour tout impayé de pension alimentaire, est, depuis le 1er janvier 2021, applicable à toute pension alimentaire, impayée ou non.

Elle consiste, pour le débiteur, à verser la contribution à l’entretien et l’éducation des enfants à la caisse d’allocations familiales (CAF) ou à la caisse de la mutualité sociale agricole (MSA), qui la reverse immédiatement au créancier. Il ne s’agit dès lors pas d’une prise en charge de la pension alimentaire par la CAF ou la MSA à la place du débiteur.

Elle ne concerne que la contribution à l’entretien et l’éducation des enfants (et non les contributions aux charges du mariage ou les prestations compensatoires) fixée sous forme de pension alimentaire en numéraire (et non sous forme de prise en charge directe de frais exposés au profit de l'enfant ou sous forme d'un droit d'usage et d'habitation.).

Les conditions

L’intermédiation financière nécessite toujours une décision de justice exécutoire fixant une pension alimentaire.

L'intermédiation peut être :

  • ordonnée d’office par le juge, en cas de violences familiales ou de menaces sur le créancier ou l’enfant
  • demandée au juge aux affaires familiales à l’occasion de la procédure en fixation du montant de la pension
  • prévue dans une convention de divorce par consentement mutuel conventionnel (art. 373-2-2, II 3° du code civil).
  • prévue par acte notarié portant notamment ou exclusivement sur la contribution à l’entretien et l’éducation de l’enfant (art. 373-2-2, II 4° du code civil).

Si la décision de justice, la convention de divorce par consentement mutuel conventionnel ou l’acte notarié a fixé le montant de la pension mais n’a pas prévu l’intermédiation financière, elle peut être demandée directement par le parent créancier à l’organisme débiteur des prestations familiales (la caisse d’allocations familiales ou la mutualité sociale agricole), et ce, quelle que soit la date du titre exécutoire fixant la pension alimentaire.

Si l’intermédiation est ordonnée par le juge ou homologuée dans la décision, le greffe transmet à l’organisme débiteur des prestations familiales (ODPF) les informations nécessaires à sa mise en œuvre (copie exécutoire de la décision) et saisit, dans les 7 jours du prononcé de la décision,  sur https://www.pension-alimentaire.caf.fr/ les informations nécessaires énumérées à l’article 1074-4 du code de procédure civile (relatives à l’identité des parents et enfants concernés, le montant de la pension, ses modalités de revalorisation, et s’ils sont connus, les numéros de téléphone et adresses postales et mails des parents).

En tout état de cause, le parent débiteur de la pension alimentaire est tenu de transmettre les informations requises pour la mise en œuvre de l'intermédiation financière, sous peine de pénalité financière.

►La mise en œuvre

• La pension alimentaire est prélevée sur le compte du parent débiteur ou versée par ce dernier à l'ODPF le premier, le dixième ou le quinzième jour du mois au cours duquel la pension est due, au choix du débiteur (sauf si la décision de justice ou la convention homologuée par le juge fixe une autre date).
La pension alimentaire est reversée au parent créancier au plus tard le lendemain de la réception effective de la pension par l'organisme débiteur ou le jour ouvré suivant le plus proche s'il s'agit d'un jour férié ou d'un jour non ouvré.

• Si un impayé survient alors que l’intermédiation financière est mise en place, l’ODPF garantit au créancier le versement d’une somme au moins égale au montant de l’allocation de soutien familial (article L581-2 du code de la sécurité sociale), soit actuellement 116,22 € par enfant et par mois. Elle procède également à une tentative amiable de recouvrement des impayés puis, en cas d’échec, elle met en place une procédure de recouvrement forcé.

• La pension alimentaire sera revalorisée automatiquement par l’organisme débiteur des prestations familiales chaque année à la date anniversaire du titre prévoyant la pension alimentaire, en fonction de la variation de l’indice des prix à la consommation hors tabac France entière publié par l’INSEE, en fonction du dernier indice publié à la date du titre, et l’indice retenu et du dernier indice publié à la date de revalorisation de la pension (article R582-7 du code de la sécurité sociale), sauf si l’intermédiation est mise en œuvre suite à une décision de justice ou une convention homologuée prévoyant des dispositions particulières à cet égard.

►La cessation de l’intermédiation financière

L’intermédiation financière prend fin :

  • en cas de décès de l’un ou l’autre des parents
  • sur demande de l'un des parents adressée à l'organisme débiteur des prestations familiales, sous réserve du consentement de l'autre parent, sauf si l’IFPA a été ordonnée par le juge aux affaires familiales dans une situation de violences (y compris sur demande du créancier)
  • lorsqu’un nouveau titre, porté à la connaissance de l’organisme débiteur des prestations familiales, supprime la pension alimentaire ou met fin à son intermédiation.
  • le cas échéant, à la date prévue dans la convention homologuée ou dans la décision judiciaire.

Le recouvrement par le Trésor public sur demande au procureur de la République

►Les textes

Cette procédure permet au comptable du Trésor public de recouvrer une pension alimentaire impayée à la place du créancier.

Les conditions

Le recouvrement public est envisageable:

  • pour les pensions alimentaires, des contributions aux charges du mariage (article 214 du code civil), des prestations compensatoires sous forme de rentes viagères (article 276) (et non à la prestation compensatoire en capital payable par versements périodiques dans la limite de huit années) ou des subsides (article 342)
  • lorsque la créance a été fixée par une décision judiciaire devenue exécutoire, une convention homologuée par le juge, une convention de divorce ou séparation par consentement mutuel conventionnel, un acte reçu en la forme authentique par un notaire ou une convention fixant le montant d’une contribution à l’entretien et l’éducation des enfants rendue exécutoire par le directeur de la CAF ou la MSA (article L582-2 du code de la sécurité sociale).

En outre, le créancier doit justifier qu'il a eu recours à l'une des voies d'exécution de droit privé et que ce recours est resté infructueux.

Le recouvrement peut concerner les termes à échoir de la pension alimentaire et, le cas échéant, les termes échus à compter du sixième mois ayant précédé la date de la demande.

La mise en œuvre

La demande de recouvrement public des pensions alimentaires est adressée par le créancier au procureur de la République près le tribunal judiciaire dans le ressort duquel se trouve son domicile.

Le procureur de la République établit un état exécutoire qu'il transmet au service compétent de l'Etat pour le recouvrement. En cas de contestation, le président du tribunal statue selon la procédure accélérée au fond. La décision n’est susceptible ni d'opposition, ni d'appel.

Dès le dépôt de la demande d'admission à la procédure de recouvrement public et jusqu'à sa cessation, le créancier ne peut plus exercer aucune autre action pour le recouvrement des sommes qui font l'objet de la demande, l'Etat étant subrogé dans ses droits et actions. A compter de la notification au débiteur des sommes faisant l'objet du recouvrement public, le débiteur ne peut plus s'en libérer valablement qu'entre les mains du comptable public compétent.

La fin de la procédure

La procédure prend fin :

  • en cas de décès du débiteur
  • lorsque l'impossibilité de recouvrer la créance a été constatée par le comptable public compétent
  • en cas de renonciation à la procédure par le créancier de la pension alimentaire, sur demande adressée au procureur de la République
  • si le débiteur a acquitté les arriérés de la créance pris en charge par le Trésor pendant douze mois consécutifs sans que le comptable public ait à exercer des poursuites, il peut demander au procureur de la République de se libérer à l'avenir directement entre les mains du créancier de la pension (en cas d'une nouvelle défaillance du débiteur dans le délai de deux ans

Les sanctions encourues en cas d’impayé de pension alimentaire

Le délit d'abandon de famille

  • articles 227-3 du code pénal : Le fait, pour une personne, de ne pas exécuter une décision judiciaire ou l'un des titres mentionnés aux 2° à 5° du I de l'article 373-2-2 du code civil lui imposant de verser au profit d'un enfant mineur, d'un descendant, d'un ascendant ou du conjoint une pension, une contribution, des subsides ou des prestations de toute nature dues en raison de l'une des obligations familiales prévues par le code civil, en demeurant plus de deux mois sans s'acquitter intégralement de cette obligation, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.
  • article 227-4 : Le fait, par une personne tenue, dans les conditions prévues à l'article 227-3, à l'obligation de verser une pension, une contribution, des subsides ou des prestations de toute nature, de ne pas notifier son changement de domicile au créancier ou à l'organisme débiteur des prestations familiales lorsque le versement de la pension fait l'objet d'une intermédiation financière dans les conditions prévues à l'article L. 582-1 du code de la sécurité sociale, dans un délai d'un mois à compter de ce changement, est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende.
  • article 227-4-3 : Le fait, pour une personne tenue de verser une contribution ou des subsides au titre de l'ordonnance de protection rendue en application de l'article 515-9 du code civil, de ne pas notifier son changement de domicile au créancier dans un délai d'un mois à compter de ce changement est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 € d'amende.
  • article 227-29 du code pénal relatif aux peines complémentaires, notamment l'interdiction des droits civiques, civils et de famille.

Délit d’organisation frauduleuse de son insolvabilité

articles 314-7 à 314-9 du code pénal : Le fait, par un débiteur, même avant la décision judiciaire constatant sa dette, d'organiser ou d'aggraver son insolvabilité soit en augmentant le passif ou en diminuant l'actif de son patrimoine, soit en diminuant ou en dissimulant tout ou partie de ses revenus, soit en dissimulant certains de ses biens, en vue de se soustraire à l'exécution d'une condamnation de nature patrimoniale prononcée par une juridiction répressive ou, en matière délictuelle, quasi délictuelle ou d'aliments, prononcée par une juridiction civile, est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. Les décisions judiciaires et les conventions judiciairement homologuées portant obligation de verser des prestations, subsides ou contributions aux charges du mariage sont assimilées aux condamnations au paiement d'aliments.