La transformation numérique du Ministère de la Justice

08/06/2023 - mise à jour : 08/06/2023

A l’instar du monde économique, le monde juridique est indiscutablement entrain de basculer dans l’ère du numérique. Le ministère de la justice  s’est engagé dans un plan sans précédent de transformation numérique, qui aura pour conséquence un changement profond de ses modes de fonctionnement. Ce plan de transformation  a pour ambition de rendre la justice plus accessible, plus rapide, plus efficace et plus transparente. Il offrira la possibilité d’une dématérialisation totale des procédures civiles et pénales. Il fera évoluer en profondeur les systèmes d’information de l’administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse.

Ainsi, les magistrats et personnels de la justice disposeront d’outils performants, les échanges avec les professionnels du droit seront facilités, les  justiciables auront la possibilité de déposer des demandes d’aide juridictionnelle et  saisir la justice en ligne, de suivre leurs affaires en ligne, l’orientation des détenus sera facilitée, ils bénéficieront de services en ligne (cantine, formations), leurs proches pourront effectuer des démarches en ligne (demande de visite au parloir, envoi d’argent). Les mineurs pris en charge par la protection judiciaire de la jeunesse seront suivis plus efficacement.

Aux côtés des principaux projets du Ministère (PORTALIS, procédure pénale nativement numérique, ASTREA, DOT, NED, PARCOURS, SIVAC etc), d’autres acteurs du droit comme les auxiliaires de justice et officiers publics et ministériels (avocats, notaires, huissiers de justice, mandataires judiciaires etc) et diverses sociétés privées (les legaltechs) développent d’autres services innovants (justice prédictive ou accès à l'information juridique).

Ces projets utilisent tous de nouveaux outils, qu’il s’agisse de l’open data ou de l’intelligence artificielle. D’autres concepts apparaissent (RGPD, blockchain, smart contracts  etc) qui ne sont pas nécessairement facilement accessibles, qui sont présentés dans le lexique du numérique.

Enfin, cette transformation numérique de la justice et de la société  pose diverses questions juridiques et sociétales, qu’il s’agisse du droit applicable aux outils numériques, de la protection des droits fondamentaux (liberté d’expression, liberté d’entreprendre, droit à la vie privée, droit à l’oubli, propriété et exploitation des données, droit d’auteur etc), mais aussi de la redéfinition de la fonction du juge.

 Depuis le 4 janvier 2021, tout justiciable peut saisir la justice en ligne depuis le site justice.fr pour les requêtes en cours de mesure de protection des majeurs devant le juge des tutelles et pour les constitutions de partie civile par voie d’intervention, après réception d'un avis à victime. (voir infra et requête numérique: le pas à pas du justiciable)

Depuis le 6 avril 2021, la saisine en ligne est possible pour les requêtes devant le juge aux affaires familiales.

A compter du 15 novembre 2021, tout justiciable peut consulter en ligne l'état d'avancement d'une procédure pénale qui le concerne.

Justice.fr, une application au service des justiciables

Le ministère de la Justice a lancé, jeudi 27 avril, une application « justice.fr » disponible sur Google Play et App Store.

Simple d’usage, elle permet de :

  • trouver un tribunal ou un point-justice à proximité ;
  • s’informer sur ses droits et démarches grâce à des milliers de fiches, thématiques issues de service-public.fr ;
  • calculer ses droits (aide juridictionnelle, pension alimentaire, saisie sur salaire) ;
  • appeler des numéros d’aide et d’orientation (30 39 – Accès au droit, 116 006 - aide aux victimes, 3039 - Violences femmes info…) ;
  • accéder aux annuaires des professionnels du droit (avocats, huissiers (aujourd’hui commissaires de justice), notaires, conciliateurs).
    appli justice.fr

Cette application, qui a vocation à être enrichie de nouvelles fonctionnalités (demande d’aide juridictionnelle en ligne, suivi de son affaire en ligne, demande de parloir pour rendre visite à une personne détenue…) et  vient compléter le site Internet justice.fr créé en 2016, qui constitue une plateforme au service des justiciables.

Le site internet offre d’ores et déjà la possibilité de se créer un espace personnel sécurisé qui permet de suivre son affaire en ligne et de saisir la justice en matière de :

PORTALIS

Programme global de modernisation et de simplification de la justice, le projet PORTALIS - ou justice.fr - est le vecteur d’un changement profond des organisations et des outils de la chaîne judiciaire.

Décomposé en six versions, qui correspondent chacun à une étape de développement et une augmentation de l’offre de services, il apporte une transformation progressive de la chaîne civile,  jusqu’à sa dématérialisation de bout-en-bout.

 

VERSION 1: Le portail informatif du justiciable, justice.fr

Le portail informatif du justiciable a été lancé le 12 mai 2016.

Le site https://www.justice.fr/ offre  aux justiciables toutes les informations utiles sur leurs droits et démarches. Il décrit les procédures et permet le téléchargement de formulaires. Il propose des calculateurs en ligne (montant des rémunérations saisissables, simulateur du montant des pensions alimentaires et simulation des droits à l’aide juridictionnelle) et des liens vers les auxiliaires de justice.

A vocation purement informative, il est la première étape du guichet numérique unique.

VERSION 2: Le portail applicatif du justiciable et le portail du SAUJ

►Le portail du justiciable

Documents et liens

Le portail du justiciable permet au justiciable, après recueil de son consentement:

-  de suivre en ligne l’état d’avancement de ses procédures civiles et, à compter du 15 novembre 2021, les procédures pénales et de télécharger divers documents

- de gérer une mesure de protection des personnes majeures, de saisir le juge aux affaires familiales et de se constituer partie civile (après réception d'un avis à victime du tribunal). 

Les procédures concernées

Le portail est actuellement accessible pour toutes les procédures civiles devant une cour d’appel, un tribunal judiciaire, un tribunal paritaire des baux ruraux ou un conseil des prud’hommes. Il peut s’agir d’une procédure avec ou sans représentation obligatoire par un avocat.

Il est également accessible pour les procédures pénales à compter du 15 novembre 2021.

→ à lire: requête numérique: le pas à pas du justiciable

Les renseignements concernés

Le justiciable peut suivre en ligne l’état d’avancement de ses procédures civiles et pénales: il a un accès direct aux dates d’audience, et à la nature des audiences (plaidoirie ou mise en état).

Il peut télécharger divers documents (convocations, avis de renvois, avis etc) qui lui étaient antérieurement adressés par lettre simple.

Dès qu’un nouvel avis ou une nouvelle convocation sont mis en ligne, le justiciable en est automatiquement avisé par mail, ledit mail ne comportant aucune donnée personnelle. De même, les dates d’audiences font l’objet d’un rappel par sms.

L'identification sur le portail

Pour avoir accès au portail, le justiciable doit:

  • disposer d'une adresse mail et d'un numéro de téléphone portable
  • disposer d’un compte auprès de l’un des fournisseurs d’identité de France Connect (impots.gouv.fr, ameli.fr, IDN La Poste, Mobile Connect et Moi ou MSA)
  • donner son consentement à la dématérialisation de son affaire en transmettant à une juridiction le formulaire de consentement à la transmission par voie électronique cerfa 15414 (un identifiant lui sera ensuite transmis par mail)
  • ajouter le dossier à son espace personnel

►Le portail du SAUJ

Le SAUJ a une mission d'information générale (informations sur les procédures de manière globale), particulière (informations plus spécifiques) et de réception d'actes (réceptionner les demandes et pièces justificatives pour les transmettre au service compétent).

Le service d’accueil unique du justiciable est un point d'accueil centralisé permettant à tout justiciable d'obtenir des informations sur les procédures en général et sur les affaires le concernant (procédures civiles et pénales, outre les procédures commerciales en Alsace-Moselle ou dans les DOM-TOM).

Il peut également réceptionner des actes et les transmettre au service compétent (l'article R123-28 du code de l'organisation judiciaire précise le périmètre de compétences du SAUJ en définissant la liste des actes qu'il peut réceptionner, à savoir notamment les demandes d'aide juridictionnelle, les plaintes déposées auprès du procureur de la République, les demandes de copies de décisions, les requêtes en matière civile et prud'homale, lorsque la représentation n'est pas obligatoire à l'exclusion des requêtes en injonction de payer etc).

VERSION 3: Le portail des auxiliaires de justice


La version 3 permettra de saisir en ligne une demande d’aide juridictionnelle en renvoyant vers e-aj. Elle devra faciliter les démarches et simplifier les circuits d’échange entre les auxiliaires de justice et les conseils de prudhommes et tribunaux judiciaires.

Le RPVA (réseau privé virtuel des avocats ou e-barreau) et le RPSH (réseau privé sécurisé des huissiers de justice) ne seront pas modifiés. OPALEX (application pour les experts) sera vraisemblablement généralisé.

VERSION 4 : Le bureau virtuel métiers

La version 4 comportera un bureau virtuel métiers pour les juridictions, et inclura les outils ARPEGE et ORM (outil d’aide à la rédaction pour les magistrats).


VERSION 5 : le nouvel applicatif de la chaîne civile

La version 5 de Portalis remplacera les applicatifs métiers actuels. Elle proposera la création de tableaux de suivi, des statistiques simples et fiables. Elle nécessitera la modélisation des 1600 types de procédures existantes. Elle sera également un outil de simplification et d’harmonisation des règles de procédure civile et permettra d’identifier les impacts des réformes législatives sur les applications métier

VERSION 6 : la dématérialisation totale de la chaîne civile

La version 6 permettra au  justiciable de saisir les juridictions en ligne sur le portail, offrira la signature électronique des décisions de justice et leur archivage numérique.

PPN

ou la procédure pénale nativement numérique

Si la numérisation des procédures pénales est largement développée dans les juridictions, le ministère de la justice et le ministère de l'intérieur disposent chacun de leurs applications propres. Dès lors, les échanges des dossiers entre les services enquêteurs (police et gendarmerie) et les juridictions sont peu fluides. En outre, les procédures pénales restent des procédures papier, de leur ouverture à leur archivage.

Le développement d'une procédure pénale nativement numérique permettra de dématérialiser totalement les échanges, d'authentifier les actes par une signature électronique et d'archiver les procédures électroniquement et de manière sécurisée. La disparition des dossiers papier doit notamment faciliter la construction et la gestion des dossiers, en générant des gains de temps depuis le dépôt de la plainte jusqu’à l’exécution de la peine. Le papier, la signature manuscrite page par page, parfois l’apposition d’un sceau laisseront ainsi la place à un dossier intégralement dématérialisé, servant d’unique support au procès pénal.

Des premières expérimentations ont eu lieu à Amiens le 30 avril 2019 et 14 juin 2019 et à Blois le 6 juin 2019, des procédures sous format numérique et signées électroniquement ayant été transmises avec succès par la police et la gendarmerie au tribunal compétent.

La PPN a été lancée au tribunal judiciaire d'Epinal le 16 octobre 2020. En 2021, elle sera étendue à toutes les juridictions françaises pour les procédures classées sans suite, dites"petits x", et elle devrait concerner l'ensemble des procédures en 2022.

ASTREA

ou le casier judiciaire national dématérialisé

En 2017, 16,3 millions de bulletins du casier judiciaire national ont été demandés, dont 3,3 millions de bulletins n°3, délivrés par voie postale.

Le projet ASTREA vise à dématérialiser la délivrance de tous les bulletins du casier judiciaire national, et les rendre accessibles 24h/24 et 7j/7.

Depuis le 26 septembre 2018, les citoyens peuvent non seulement demander un bulletin en ligne, mais peuvent également télécharger une version numérique de leur bulletin n°3, si ce bulletin est néant, et ce de manière sécurisée

A terme, tous les bulletins (B1, B2 et B3)  des personnes physiques et morales, quelles que soient leurs données, seront entièrement numériques.

DOT

ou le dossier d'orientation de transfert de la personne détenue

L'orientation d'une personne détenue fait intervenir de nombreux acteurs, tant au niveau local que central.

Le DOT a pour objectif de traiter de manière entièrement dématérialisée l'ensemble du dossier d'orientation, de l'instruction jusqu'à la prise de décision, afin de simplifier le processus d'instruction et d'en réduire les délais, de  fluidifier les transferts des détenus des maisons d'arrêt vers les établissements pour peine,  et de redonner à chaque acteur son rôle dans l'orientation d'une personne détenue.

NED

ou le numérique en détention

S'il ne permettra pas aux détenus d'accéder librement à l'internet, le projet NED facilitera leur quotidien, celui de leurs proches et celui des personnels pénitentiaires. Il a un triple objectif:

- décharger les personnels pénitentiaires de certaines tâches  afin qu'ils puissent se consacrer à leur coeur de métier que sont les missions de surveillance et de préparation à la sortie

- simplifier les démarches des proches: aujourd'hui, les demandes de visite aux parloirs se font via une plate forme téléphonique accessible aux heures de bureau ou via des bornes se situant dans l'établissement pénitentiaire; le projet NED permettra de réserver un parloir via internet, à toute heure et quel que soit l'endroit où l'on se trouve; aujourd'hui, l'alimentation du pécule d'une personne détenue se fait par virement bancaire ou mandat de de justice; le projet NED permettra aux proches d'envoyer en ligne de l'argent aux personnes détenues, via leur carte bancaire

- faciliter la vie des  détenus: aujourd'hui, toutes les requêtes des détenues sont écrites, sur papier libre, puis transférées au surveillant et communiquées à l'administration, traitées, la réponse étant transférée aux détenus par le même circuit; le projet NED permettra aux détenus de gérer eux-mêmes, depuis leur cellule ou les salles d'activités, leur cantine et accéder à des formations en ligne.

PARCOURS

ou la refonte des applications du système d'information de la protection judiciaire de la jeunesse

LOGO PARCOURS

Depuis le mois de mai 2021, l’application PARCOURS a succédé à GAME, l’outil de pilotage de l’activité et du suivi des mesures éducatives du secteur public, et à IMAGES, l'outil réservé au secteur associatif habilité (SAH), pour 3000 utilisateurs (voir l'arrêté du 7 avril 2021 portant création d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « PARCOURS »)

Ce nouveau système d'information de la protection judiciaire de la jeunesse a pour objectif d'une part, de placer le jeune au centre du dispositif et rendre leur parcours plus lisible, et d'autre part d'évaluer les politiques publiques menées par la protection judiciaire de la jeunesse et les effets des prises en charge des mineurs,  depuis leur prise en charge par la protection de l'enfance  et jusqu'à leur majorité.

Pour ce faire, des données statistiques sont disponibles en continu et un dossier unique de personnalité dématérialisé du mineur est mis en oeuvre. Le partage des informations sur le parcours des adolescents entre professionnels est facilité, tout en étant sécurisé: Les professionnels peuvent y intégrer leurs notes quotidiennes, des rapports éducatifs, des documents administratifs, qui ne sont visibles qu'en fonction des droits d’accès de l'utilisateur.

A terme, PARCOURS pourrait être connectée avec les systèmes d'information des autres directions du Ministère de la Justice (CASSIOPEE, WINEURS, GENESIS), mais également ceux du secteur associatif habilité et de l'aide sociale à l'enfance.

SIVAC

ou le système d'information interministériel des victimes d'attentats et de catastrophes

La Direction Générale de la Sécurité Civile et de la Gestion des Crises et la Direction Générale de la Santé disposent aujourd'hui d'outils informatiques utilisés lors de la gestion des crises comportant de nombreuses victimes (SINUS pour les pompiers et SIVIC pour les hôpitaux).

Le futur système d'information interministériel des victimes d'attentats et de catastrophes (SIVAC) vise à faciliter le partage d'informations et à accélérer la prise en charge des victimes d'attentats et de catastrophes. Il sera développé par les onze administrations concernées, afin de leur permettre de partager les informations nécessaires et assurer un meilleur suivi, un meilleur accompagnement et une prise en charge plus rapide des victimes.

SIAJ

ou le système d'information de l'aide juridictionnelle

Plus d'un million de demandes d'aide juridictionnelle sont déposées chaque année, sous format papier, puis traitées via un logiciel obsolète.  Le SIAJ devra permettre la dématérialisation de la plupart des échanges entre les justiciables et les auxiliaires de justice (avocats et huissiers de justice), et une plus grande efficacité des processus d'instruction des demandes d'aide juridictionnelle.Il offrira aussi un outil de pilotage et d'analyse de l'aide juridictionnelle.