Colloque sur l'office du juge

17/06/2022 - mise à jour : 17/06/2022
image du colloque

Après deux années marquées par la crise sanitaire, les murs de la cour d’appel ont à nouveau accueilli le colloque annuel organisé dans le cadre de la convention cadre de partenariat « les entretiens Portalis » ce jeudi 9 juin 2022.

Un vibrant hommage a été rendu à l’ancien premier président Eric NEGRON qui a été à l’initiative de cette convention cadre de partenariat, initialement signée en mai 2018 en présence de Mme BELLOUBET, Ministre de la Justice, Garde des Sceaux, partenariat qui a permis l’organisation d’évènements d’importance à la cour d’appel : colloque annuel, faculté au Palais, Nuit du droit.

Monsieur le Recteur de l’Académie d’Aix-Marseille Bernard BEIGNIER a ouvert le colloque. Co-auteur de l’ouvrage Droit et déontologie des magistrats, il a présenté le livre qui part du principe d’une existence distincte de la déontologie et du droit, la déontologie étant nécessairement plus informelle, représentant le sens critique dans l’exercice de la fonction. Monsieur le Recteur est revenu également sur la notion de « partenaires » de justice, une notion forte qui ne peut concevoir le juge sans l'avocat. Il a ajouté que le rôle de l’avocat ne peut par ailleurs se réduire à la pratique si dense aujourd'hui du conseil. C’est tout l’intérêt de ces colloques annuels que de confronter les points de vue des magistrats, des avocats et des universitaires.

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 Intervention de Monsieur BEIGNIER

Monsieur Renaud LE BRETON de VANNOISE, premier président de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, et Madame Marie-Suzanne LE QUEAU, procureure générale près ladite cour, ont prononcé les allocutions d’ouverture, en rappelant l’implication déterminante du premier président Eric NEGRON dans la tenue de ce partenariat. Les chefs de cour ont expliqué la genèse de ce projet (le précédent thème retenu « sport et droit », annulé en 2021, se tiendra en 2024 à l’occasion des jeux olympiques).
La thématique de l’office du juge pose la question de sa place dans un contexte de réduction, voire d’effacement, de ses prérogatives habituelles.

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 Intervention de Monsieur LE BRETON de VANNOISE et de Madame LE QUEAU

Monsieur Vincent MAZEAUD, professeur à Aix-Marseille Université, vice-doyen « recherche » de la Faculté de droit et de science politique d’Aix-en-Provence, a dit sa difficulté à aborder les différents offices du juge, les définir précisément, les délimiter. Il a posé la question de savoir si le juge a le devoir, voire le pouvoir, de soulever la vérité des parties. Il a évoqué l’article 12 du code de procédure civile sur l’office classique du juge qui est de dire le droit pour trancher les litiges, puis des missions plus contemporaines, promues par la société, comme le contrôle de proportionnalité et la conciliation.
Il a également invité les participants à ne pas négliger la pluralité des missions accordées au juge que ce soit des missions de prévention, de régulation, de respect du droit, de respect du procès équitable, de cohérence du droit, de communication avec les citoyens et avec les autres juridictions.

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Intervention de Monsieur MAZEAUD

La première table ronde sur l’office du juge civil était composée de monsieur Renaud LE BRETON de VANNOISE, premier président de la cour d’appel, maître Corinne TOMAS-BEZER, avocate au barreau de Marseille et de madame Caroline SIFFREIN-BLANC, maître de conférences à Aix-Marseille Université (Laboratoire de droit privé et de sciences criminelles - LDPSC). Monsieur Philippe SILVAN, président de chambre à la cour d’appel d’Aix-en-Provence, a assuré le rôle de modérateur de la table ronde.

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 Intervention de Monsieur SILVAN et intervenants de la table ronde n°1

Monsieur LE BRETON de VANNOISE, premier président de la cour d’appel, a évoqué les différents offices du juge civil, allant de l’office de conciliation (un office historiquement introduit en droit civil dès 1790 par un idéal de fraternité de la Nation), d’appui (procédure participative) à l’office de régulation (dans une dimension tournée vers l’intérêt général) et de décision (voire de codécision, de co-construction de la décision avec l’approche proactive des avocats).

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Intervention de Monsieur LE BRETON de VANNOISE

Maître TOMAS-BEZER, avocate au barreau de Marseille, est revenue sur la procédure participative qui représente selon elle une manière d’améliorer l’office du juge en concertation avec l’avocat. Elle a souligné que les avocats doivent être formés à cette procédure qui doit être impulsée par les magistrats.

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 Intervention de Maître TOMAS-BEZER

Madame SIFFREIN-BLANC, maître de conférences à Aix-Marseille Université, a fait un focus sur l’office du juge aux affaires familiales (JAF) suite à des travaux de recherche conduits quant à leur pratique, quant au regard porté sur leur mission et à leur prise de position notamment au regard de la décision prise en matière de résidence de l’enfance. Elle a évoqué deux évolutions notables : la pluralité des missions des offices accordés aux JAF et la complexité particulière de son office.

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 Intervention de Madame SIFFREIN-BLANC

La deuxième table ronde portait sur l’office du juge administratif. Monsieur Olivier LE BOT, professeur à Aix-Marseille Université (Groupe d'études et de recherches sur la justice constitutionnelle - GERJC), en était le modérateur. Madame Laurence HELMLINGER, présidente de la cour administrative d’appel de Marseille, Madame Camille BROYELLE, professeur de droit public à l’Université Paris-Panthéon Assas et maître Didier DEL PRETE, avocat au barreau d’Aix-en-Provence, ont pris la parole pour évoquer cet office du juge administratif.

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 Intervention de Monsieur LE BOT

Madame HELMLINGER, présidente de la cour administrative d’appel de Marseille, a rappelé la distinction traditionnelle en contentieux administratif, entre le recours pour excès de pouvoir (REP) et le recours de plein contentieux. Elle a développé trois idées : la cristallisation de l’identité du juge administratif en tant que juge de l’excès de pouvoir, la déconstruction du recours pour excès de pouvoir qui témoigne de l’adaptabilité du juge administratif qui fait évoluer son office afin de garantir le respect du principe de légalité, et préserver l’effet utile de l’intervention du juge et enfin des nouvelles frontières du plein contentieux ou la reconnaissance de droit et de l’injonction.

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 Intervention de Madame HELMLINGER

Madame BROYELLE, professeur de droit public à l’Université Paris-Panthéon-Assas, est intervenue sur l’évolution de la façon dont le juge administratif se perçoit, dans un objectif fixé par le Conseil d’Etat de rétablissement de la légalité.

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 Intervention de Madame BROYELLE

Maître DEL PRETE, avocat au barreau d’Aix-en-Provence, a rappelé que « percevoir son office est le rôle premier du juge » mais c’est aussi celui le rôle premier de l’avocat. L’avocat est au service de son client, avant d’être au service du droit. Il a fait état de l’évolution de l’office du juge administratif à travers la création des cours administratives d’appel dès la fin des années 1980, la reconnaissance en 1995 d’un pouvoir d’injonction, et l’introduction en 2000 des procédures de référé. Le renouveau du procès administratif s’est poursuivi ensuite, avec des objectifs ambitieux de rapidité, d’équité et de loyauté.

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Intervention de Maître DEL PRETE

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Magistrats, personnels de greffe, avocats, universitaires, élèves-avocats ont assisté au colloque 

Maître Benoît PORTEU DE LA MORANDIERE, bâtonnier de l’Ordre des avocats d’Aix-en-Provence, a introduit la troisième table ronde portant sur l’office du juge pénal en indiquant que tous les magistrats ne sont pas juges et n’ont pas pour office de trancher mais d’instruire. Il faudrait plutôt parler des offices des juges en matière pénale, plutôt qu’un unique office d’un unique juge.

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 Intervention de Maître PORTEU DE LA MORANDIERE

Monsieur Luc FONTAINE, premier président de chambre, coordonnateur du pôle pénal à la cour d’appel d’Aix-en-Provence, a introduit son propos en évoquant le principe de légalité qui constitue le socle historique de notre matière juridique en matière pénale puis citant Montesquieu : « Les juges ne sont que la bouche qui prononce les paroles de la loi, des êtres inanimés, qui n’en peuvent modérer ni la force ni la rigueur. » Le principe de légalité est aujourd’hui remis en cause car l’office du juge a naturellement évolué : ce n’est désormais plus un simple arbitre mais un véritable acteur du système juridique.

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 Intervention de Monsieur FONTAINE

Maître Christophe BASS, avocat au Barreau de Marseille, a donné une définition dualiste de l’office du juge pénal : soit il se définit par le prisme du juriste (définition technique et descriptive), soit par le prisme de la pratique quotidienne du juge pénal. Maître BASS a insisté sur l’exigence et la complexité de l’action de juger son prochain, qui conduit à élever la justice au rang de vertu. Selon lui, la qualité première et l’essence de la mission du juge pénal est l’écoute, non seulement en tant que capacité (attitude, posture) mais aussi en tant que disponibilité d’esprit à dialoguer, dont l’audience serait le point d’orgue.

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 Intervention de Maître BASS

Madame Muriel GIACOPELLI, professeur à Aix-Marseille Université (Laboratoire de droit privé et de sciences criminelles – LDPSC), a ajouté que l’office premier du juge pénal est d’assurer la garantie des droits et libertés individuelles. Aussi, le juge pénal doit faire preuve de pédagogie, en expliquant, en motivant sa décision. L’office du juge pénal s’est aujourd’hui transformé en une reconnaissance de sa force créatrice.

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 Intervention de Madame GIACOPELLI

La quatrième table ronde a traité de l’office du juge financier. Monsieur Jean-Luc ALBERT, professeur à Aix-Marseille Université au centre d’études fiscales et financières (CEFF), en était le modérateur. Madame Audrey CAVAILLIER, première conseillère à la chambre régionale des comptes PACA et monsieur Florent OLIVIER, docteur en droit public à Aix-Marseille Université (CEFF), sont intervenus pour présenter les missions et les évolutions du rôle de la cour des comptes et des chambres régionales des comptes, monsieur OLIVIER ayant ouvert le débat sur la place du juge financier, notamment en matière de contentieux fiscal.

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 Intervention de Monsieur ALBERT

Madame CAVAILLIER, première conseillère à la chambre régionale des comptes PACA, a pris la parole pour dire combien l’office du juge financier est malheureusement trop méconnu, dans la mesure où ses représentants forment un corps en faible nombre. Elle a souligné qu’historiquement le juge financier est historiquement lié à la Cour des comptes qui est une juridiction. Les juges financiers travaillent en collégialité sous le contrôle d’un ministère public.

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 Intervention de Madame CAVAILLIER

Monsieur OLIVIER, docteur en droit public à Aix-Marseille Université (CEFF), a évoqué les difficultés à classer de façon homogène l’office du juge financier. Le juge financier fait partie d’un ensemble plus large, celui du droit public financier. Monsieur OLIVIER a répondu à deux questions : la place du juge civil en matière de contentieux fiscal et si son office est correctement assuré.

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 Intervention de Monsieur OLIVIER

Le discours de clôture du colloque sur l’office du juge « de la diversité de l’office à l’unité de la fonction » a été prononcé par monsieur Jean-Baptiste PERRIER, Doyen de la Faculté de droit et de science politique d’Aix-en-Provence. Il a repris les mots du Recteur GUINCHARD : un office de taille, au vu d’un but fort et partagé : « l’ambition raisonnée d’une justice apaisée ».

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 Intervention de Monsieur PERRIER