Histoire du Palais
Une galerie de 40 photos commentées pour découvrir l'histoire du Palais.
L'île de la Cité a été le siège de pouvoirs importants. Dans la partie orientale se trouvait le pouvoir religieux et dans la partie occidentale se situait le pouvoir étatique. Les premiers rois à s'y établir furent les Capétiens. Philippe Auguste, qui fit paver les rues de Paris, se maria au Palais. Il répudia sa femme danoise au lendemain de sa nuit de noces. Son petit-fils Saint Louis habita le palais et acheta auprès de l'empereur Byzantin Baudouin les reliques de la Passion. Il fit construire un grand reliquaire pour les abriter : la Sainte Chapelle. Cette construction dura 6 ans. De l'époque du Moyen-Age, il reste la Sainte-Chapelle et la Conciergerie. Le petit-fils de Saint Louis, Philippe le Bel, fit de grands travaux. Charles V fut le dernier roi qui habita le palais. Les rois de France habitèrent ensuite le Louvre et l'Hôtel Saint Pol. |
A partir de Charles V cela devient le palais de justice.
Un premier incendie a lieu en 1614. On dit que c'était pour détruire les archives du procès Ravaillac. Un deuxième incendie s'est produit sous Louis XVI.
Le palais de justice s’étend sur 4 hectares et 24 kilomètres de couloirs le parcourent.
L'horloge
Charles V décida de faire construire la première horloge publique. Elle donnait l'heure pour les cloches des églises. Elle fut restaurée sous Henri III par le sculpteur Germain Pilon qui habitait le Palais. Ce grand sculpteur de la Renaissance est l'auteur des sculptures de la fontaine des Innocents.
En haut, se trouvent les blasons du roi de France et de celui de Pologne : Henri III qui était le souverain des deux pays. L'inscription située dans la partie supérieure indique : « Celui qui a déjà donné deux couronnes donnera la troisième ». A gauche est figurée la Loi avec les tables de la Loi et la main de justice. A droite est représentée la justice. |
La traduction de l'inscription en latin, située sur la partie inférieure est : « Cette machine qui fait aux heures douze parts si justes enseigne à protéger la Justice et à défendre les lois ». |
L'entrée du palais de justice
Suite au deuxième incendie, Louis XVI fait appel aux architectes Couture et Desmaisons pour la restauration du palais à qui l'on doit :
- le perron,
- l'aile en retour (qui cache la Sainte Chapelle),
- l'escalier monumental (pour rendre la justice, il faut être au plus près de Dieu),
- les quatre colonnes doriques (car la galerie marchande menaçait de s'effondrer)
Ce palais servira de référence aux autres palais de justice construits en France.
La cour du Mai est appelée ainsi car la basoche (regroupements de clercs) y plantait un chêne tous les ans au mois de mai. Cet arbre provenait de la forêt de Bondy ou de Vincennes et c'était l'occasion d'une grande fête (spectacles, farces…). L'arbre était appelé le Mai ou arbre de Mai d'où le nom de cour du Mai (et non cour de mai).
Dans la partie supérieure du bâtiment, sont représentées 4 statues allégoriques (de gauche à droite) : l'abondance (avec la corne), la justice (avec le glaive), la prudence (avec un miroir qui renvoie les défauts à ceux qui regardent) et la force.
Le portail de la cour du Mai
Sur le fronton et le portail, au dessous de la couronne royale et entourant le blason du roi de France sont réprésentés les deux colliers de l'ordre du Saint Esprit et de l'ordre de Saint Michel, créés par Louis XI et Henri III.
La salle des pas perdus
Sous Philippe Le Bel, il s'agissait de la grande Salle (plus belle salle du palais).
Enguerrand de Marigny fit construire deux salles superposées de 70 mètres de long (une haute, la grand'salle et une basse, la salle des gens d'armes de la Conciergerie).
Cette grande salle possédait une charpente en bois (coque de bateau renversée). Cette salle brûla en 1644 et un voûtement de pierre fut reconstruit.
Cette salle fut brûlée sous la Commune mais reconstruite à l'identique.
Lorsque les rois de France ne vont plus vivre au Palais, cette salle va devenir une salle dans laquelle sont organisées des fêtes mais elle sera également le siège de juridictions différentes.
C'est dans cette salle que sera créée la Farce de Maître Pathelin.
Sous l'Ancien Régime, quatre groupes de personnes se trouvent au Palais :
- les magistrats
- les avocats dont le bâtonnier (il possède un bâton avec au bout l'effigie de leur saint patron)
- les procureurs (anciens avoués)
- la basoche (= regroupements de clercs)
La salle des pas-perdus |
La statue de Malesherbes
Premier groupe sculpté à droite : il s'agit de la statue de Malesherbes (un des trois avocats de Louis XVI).
Les avocats parisiens ne peuvent plus porter l'hermine car ils n'ont pas sauvé le roi.
Malesherbes est entouré de la fidélité (accompagnée de son chien) et de la France. La France a la fesse dénudée. Deux hypothèses pour expliquer cette curiosité : soit il s'agit d'une vengeance de l'artiste qui n'aurait pas été payé (ce qui est faux) soit il s'agit d'une référence à la statuaire antique.
Le bas-relief de la statue de Malesherbes
Le bas-relief situé sur la base de la statue représente Malesherbes et les deux autres avocats (Tronchet et De Sèze) qui viennent visiter Louis XVI au temple. Sur la gauche, le valet du roi pleure. La mappemonde fait référence à Louis XVI qui enseignait la géographie à ses enfants. Ce bas-relief comporte deux incohérences : sous la Révolution les avocats ne pouvaient plus porter la robe et Malesherbes porte ici une ceinture de magistrat. Pendant longtemps, les avocats portaient un double rabat qui symbolisait les tables de la loi.
La statue de l'avocat Berryer
Deuxième groupe sculpté : il s'agit de la statue de l'avocat Berryer (sous la Révolution) réputé pour son éloquence. Il est entouré de la fidélité et de l'éloquence.
Sous l'éloquence, se trouve une tortue qui symbolise la lenteur de la justice. Cela est d'autant plus drôle que cette statue se situe à côté de la chambre des référés.
Aujourd'hui, il existe les « conférences Berryer » qui sont des joutes oratoires humoristiques organisées par le Barreau.
La première chambre du tribunal de grande instance
Il s'agit de la grande salle du Parlement de Paris. Les audiences s'y tenaient après la messe. Le Parlement faisait des remontrances au roi. Peu à peu le Parlement va devenir un contre pouvoir pour le roi.
C'est dans cette salle que le testament de Louis XIV va être cassé (il voulait désigner comme successeur le fils qu'il avait eu avec Mme de Montespan). Le roi siégeait à gauche de la salle (lorsque l'on regarde vers l'estrade) entouré de coussins, comme s'il était sur un lit (d'où l'expression lit de justice). De nos jours, il est toujours laissé un fauteuil vide, lors des audiences solennelles, qui symbolise le fauteuil du roi (voir la photo ci-dessous). Actuellement, le Premier Président de la Cour de cassation porte la même tenue que le roi lorsqu'il rendait la justice.
Dans cette salle, se trouvait le retable de Paris (il s'agit d'une crucifixion) qui, aujourd'hui, se trouve au musée du Louvre.
ll faut noter que suite à un grand incendie lors de la Commune en 1871, cette première chambre a été reconstruite à la fin du XIXe siècle, identique à son décor d'origine datant de Louis XII (époque Renaissance).
Sous la Révolution, les Parlements vont être supprimés et cette salle deviendra le tribunal révolutionnaire. Elle va être nommée salle de la liberté et des draps blancs vont être disposés sur les murs. Le tribunal révolutionnaire va siéger de 1793 à 1795. Près de 2 700 personnes vont être condamnées à l'échafaud dont Marie-Antoinette, Danton, Robespierre et même Fouquier-Tinville qui avait été accusateur public du tribunal révolutionnaire. Cette salle fut ensuite occupée par le Tribunal (puis la Cour) de cassation jusqu'en 1870. |
Détail du plafond de la salle de la première chambre. Il s'agit d'un plafond à caisson, il comporte des clefs pendantes, au dessus de la corniche dans les lunettes, on trouve des porcs épics, animal symbole de Louis XII dont la devise était : « qui s'y frotte s'y pique ».
Les fauteuils du président et des assesseurs. A l'arrière-plan : le « fauteuil du roi », traditionnellement laissé vide lors des audiences solennelles. |
Origine de certaines expressions Sous l'Ancien Régime, Charles le Bon (père de Charles V) avaient promulgué un édit pour « prévenir soit dans les mémoires soit dans les plaidoiries, les répétitions inutiles et les digressions oiseuses ». A cette même époque, la salle d'audience était composée de parquet et au fond d'un dallage. Lorsque l'audience se terminait car il n'y avait plus de lumière, les plaideurs « restaient sur le carreau ». Une autre expression vient également de ce dallage puisque lorsque les plaideurs faisaient trop de bruit le Président les renvoyait sur le carreau (au fond de la salle) et les invitait donc à « se tenir à carreau ». |
Le fronton de la salle des pas perdus
Sur le fronton d'accès à la galerie marchande, Hermès (dieu des commerçants et des voleurs), à gauche, et Hestia (déesse du foyer), à droite, entourent les tables de la loi et la justice. Le coq représente la lumière : les juges doivent être inspirés pour rendre la justice.
La galerie marchande
Philippe le Bel créa le poste de Concierge et ce dernier louait des places aux commerçants. Les échoppes ont disparu au XIXème siècle.
La galerie des prisonniers
Près de la galerie marchande se trouvent le fronton de juridictions de l'ancien régime : la chambre des eaux et forêts (symbole de l'agriculture et de la pêche : tête de biche, carpe, épervier…) et le fronton de la chambre des bâtiments (compas d'architecte, équerre…).
Tout ce qui a été vu précédemment concernait le domaine civil, nous nous dirigeons maintenant vers le vestibule de Harlay qui concerne le domaine pénal.
Le vestibule de Harlay*
L'architecte Duc a eu en charge le « plus grand chantier du XIXème siècle » après celui de l'Opéra. Il a construit la façade ouest du palais de justice (celle qui donne sur la place Dauphine).
Le vestibule donne accès aux deux salles de la cour d'assises. Cette entrée est monumentale avec la représentation de l'équité (la balance est pliée sous le bras) qui est entourée de deux cariatides qui représentent des magistrats.
*Achille Ier de Harlay est un magistrat français (1536-1616), qui a été le premier président du Parlement de Paris de 1582 à 1611.
Il faut préciser que ce n'est qu'en 1945 qu'une femme est entrée dans la magistrature et en 1900 dans l'avocature.
Au-dessus, se trouve l'urne dans laquelle les jurés sont tirés au sort.
Dans les quatre coins du vestibule sont représentés : Saint Louis, Philippe Auguste, Charlemagne et Napoléon.
A gauche, la porte d'inspiration égyptienne, à droite : la pelta, le bouclier des Amazones. |
A gauche, statue de Charlemagne, à droite : le buste de l'architecte Duc. |
La façade ouest du palais
L'architecte Duc s'est inspiré du temple antique égyptien de Dendera : porte trapézoïdale, mur bahut (en dessous des fenêtres), colonnes cannelées surmontées de figures féminines.
Cette façade devait être l'entrée du palais de justice c'est pourquoi c'est la seule sur laquelle est inscrite Palais de justice. Elle est ornée de six statues qui représentent (de gauche à droite) : la prudence, la vérité, le châtiment, le protection de l'enfant, la force et l'équité.
Au dessus, on retrouve des symboles de la justice et deux aigles rappelant que cette façade a été construite sous Napoléon III.
La première chambre de la Cour d'appelSous l'Ancien Régime, cette salle était la Cour des comptes. Au XIXème siècle, la salle fut refaite par Daumet qui a conservé de l'ancienne chambre des comptes, les dessus de porte en bois doré representant des figures allégoriques tenant le cartouche royal (trois fleurs de lys). Au plafond, on trouve des symboles de la justice comme : la main de justice (jus), c'est l'un des attributs royaux donnés lors du sacre à Reims, au roi par Dieu. Les trois doigts signifient : j'ordonne, je pardonne, je bénis. La dernière main de justice fut détruite sous la Révolution. En 1945 se tint dans cette salle le procès du maréchal Pétain. C'est pour accueillir les journalistes, que la tribune fut construite. Au dessus des lustres, sont représentées les toques des magistrats. La toile de Bonnat, datée de 1901, représente la justice qui protège l'innocence et chasse le crime tandis que le masque de l'hypocrisie tombe. |
Dans les boiseries, on retrouve les symboles de la justice, de la loi, de la cour d'appel, des rameaux d'olivier et des feuilles de chêne.
Au mur, les tapisseries de la manufacture des gobelins racontent l'histoire d'Esther. |
Les plateaux correctionnels
Les chambres correctionnelles sont réparties sur deux étages avec, à chaque étage, quatre chambres. On y trouve un décor de feuilles de chardon et de houx.
Au-dessus des portes des quatre chambres, Méduse est représentée, elle est censée impressionner. Dans la mythologie, Méduse pétrifiait les personnes qui croisaient son regard. Elle fut vaincue par Persée qui lui tranchât la tête après l'avoir regardée dans son bouclier. Il offrit sa tête à Athéna qui en orna son bouclier.
Cette partie du palais de justice a été construite entre 1900 et 1910 par Tournaire. |
Dans les médaillons sont représentés : la balance, le glaive (photo), les tables de la loi et une main de justice ouverte (il faut y voir un trait d'humour). |
Deuxième plateau des chambres correctionnelles
Sur le deuxième plateau, nous sommes face à un bel exemple de stéréotomie, c'est-à-dire un agencement des pierres taillées.
Deuxième plateau correctionnel : sur le pourtour de la verrière sont disposées des feuilles de chardon. |
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Des éléments décoratifs figurent sur la rampe et en mosaïque sur le sol : les tables de la Loi, un delta lumineux (triangle maçonnique symbolisant l'œil du grand architecte), la pelta (le bouclier des Amazones). |
En bas de l'escalier, on retrouve un faisceau de licteurs, comme sur les grilles d'accès au palais, c'est-à-dire un ensemble de bâtons entourés par des lanières et au centre une hache.
Les licteurs accompagnaient les magistrats romains pour faire exécuter leurs sentences, ce faisceau représentait un triple pouvoir de sanction : le fouet par les lanières, la bastonnades par les bâtons et la décapitation par la hache.
Fin du dossier
Auteurs : Bernadette Verdeil et Géraldine Mouraas. Photos : Cour d'appel de Paris