Communiqué de presse du 9 février 2022

Cour d’appel de Toulouse
09/02/2022 - mise à jour : 10/02/2022
Balance

La cour d’appel de Toulouse reconnaît le droit pour une personne transgenre homme devenu femme, qui a conçu un enfant avec son appareil reproductif masculin, d’être désignée comme mère dans l’acte de naissance de l’enfant.

L’époux d’un couple hétérosexuel ayant déjà donné naissance à plusieurs enfants, a changé de sexe tout en conservant son appareil reproductif masculin. Un nouvel enfant est né du couple, après le changement d’état civil du mari devenu femme.

Suite au refus de l’officier de l’état civil de transcrire sur l’acte de naissance de l’enfant, la reconnaissance de maternité souscrite par la femme non gestatrice, le couple a saisi la justice.

Par arrêt du 14 novembre 2018, la cour d’appel de Montpellier a ordonné la mention de celle-ci sur l’acte de naissance de l’enfant comme « parent biologique ».

Par arrêt du 16 septembre 2020, la Cour de cassation a jugé que la loi française ne permet pas de désigner, dans les actes de l'état civil, le père ou la mère de l'enfant comme « parent biologique » et que le droit au respect de la vie privée et familiale n'impose pas une telle mention. Elle a renvoyé l’affaire devant la cour d’appel de Toulouse.

Par arrêt de ce jour, la cour d’appel de Toulouse autorise la mention sur l’acte de naissance de l’enfant, de l’époux devenu femme en qualité de mère.

La cour d’appel a considéré que deux filiations maternelles pouvaient en l’espèce être établies.

Avant 2016, la personne voulant obtenir le changement de la mention du sexe, devait, en plus de la réalité du syndrome transexuel, justifier du caractère irréversible de la transformation de son apparence de sorte que la question de la filiation d’un homme devenue femme à l’égard d’un enfant qu’il ne pouvait avoir conçu avec ses anciens gamètes mâles ne se posait pas.

 

Il en est différemment depuis la loi du 18 novembre 2016 qui autorise dorénavant le changement de sexe sans réassignation sexuelle et fait coexister des réalités juridique et biologique distinctes.

Mais cette loi laisse un vide juridique indéniable, faute de disposition relative à la filiation des enfants nés postérieurement à la modification de la mention du sexe à l’état civil, alors même que la maternité gestatrice n’est plus exclusive.

Or, l’intérêt supérieur de l’enfant et le droit au respect de la vie privée respectivement consacrés par la convention de New York et la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, rendent impérative la nécessité de permettre à l’enfant né d’un couple dont l’un de ses membres est transgenre, de voir sa filiation doublement établie à l’égard de ses deux parents, dès lors qu’il n’est pas contrevenu aux principes fondamentaux du droit national.

L’évolution législative et notamment la loi du 2 août 2021 permettant, dans un couple de femmes, à la mère non gestatrice de reconnaître l’enfant à venir de manière anticipée dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation, démontre l’absence de trouble à l’ordre public découlant de l’établissement d’une double filiation maternelle hors adoption.

Enfin, la cour d’appel a jugé qu’il n’était pas nécessaire d’ordonner la mention, sur l’acte de naissance de l’enfant, du jugement de changement de sexe de son parent, intervenu plusieurs années avant sa naissance. Elle a considéré que l’enfant pourra avoir accès à ses origines biologiques par le biais de l’acte de naissance de ce parent, qu’il lui sera loisible de demander à tout moment et qu’en outre, une telle mention porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée.

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